Un nouvel article sur mon blog :
« Au nom de la loi, je vous arrête, vous n’avez pas le droit de porter une croix ! » (La police de la charte)
25 août 2013 par commeunpharedanslanuit
Le gouvernement Marois veut présenter sa charte de la laïcité à l’automne, prétendant que c’est ce que les Québécois veulent (ils ne veulent surtout pas qu’on parle de la dette, du déficit, de l’éducation, des infrastructures délabrés, du système de santé…). Les uns diront que c’est une bonne chose les autres crieront à la perte de liberté de conscience et de religion. Les discours démagogues pullulent déjà depuis la « fuite » que le ministre Drainville a laissé couler ("tâtage" de terrain… pour mieux avancer ou reculer selon le baromètre électoral).
Voyons un peu ce qui en est réellement de cette volonté de bannir tout signe religieux « ostentatoire ». D’ailleurs, qu’entendons-nous par ostentatoire ? Le col romain, c’est ostentatoire ?
La laïcité est un concept inventé par le christianisme, voire par le Christ Lui-même : « rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Nouveauté inouïe qui vient dire, ce qui appartient à la cité, à la vie sociale, au travail, ce sont les choses des Hommes (même si le chrétien, idéalement, ne sépare pas ces choses humaines de la vie de Dieu). Rendre à Dieu ce qui est à Dieu n’a jamais voulu dire : écartez Dieu de la cité et renvoyez-le dans son ciel. La laïcité consistait à la base à faire une distinction entre les clercs (les consacrés) et les hommes et les femmes vivant dans la cité, non religieux, donc laïcs. Le principe de laïcité consiste à organiser la vie de la cité en laissant l’expression du religieux cohabiter de manière pacifique et non de l’éradiquer ou de l’interdire. L’interdire est du laïcisme et c’est une forme de fanatisme athée et intolérant. L’état n’a pas à imposer l’athéisme mais à laisser chacun vivre sa foi dans la mesure où elle ne vient pas mettre en danger la vie d’autrui ou déranger l’ordre public.
La séparation de l’Église et de l’état a été nécessaire. Si l’Église a pu se confondre avec les choses de l’état à certains moments de l’histoire, la tendance s’est surtout inversée depuis quelques décennies : l’état – dont le rôle principal est de gérer les biens temporels de la cité – se mêle maintenant de tout ce qui appartient au for intérieur du citoyen : de sa sexualité (propagande chez nos jeunes, avortement, hygiène sanitaire, etc.) à son éducation religieuse (cours d’ÉCR), à sa vie de couple (mariage, mariage pour personnes de même sexe, fécondation in vitro, etc.), à sa mort (euthanasie, suicide assisté, etc.) et, maintenant, il veut s’introduire dans sa liberté de conscience pour réprimer les personnes dans leur droit fondamental de liberté de religion – liberté garantie par les chartes et les Droits de l’Homme – sous prétexte qu’ils travaillent dans la fonction publique et que l’état doit être neutre. L’état certes. Mais les personnes en tant qu’individus libres ? Au nom de quoi ? Bien sûr, nous savons tous que c’est en raison de la peur des groupes radicaux (notamment de l’Islam politique) que le gouvernement veut balayer « at large » tous les signes religieux pour éviter d’ostraciser un seul groupe. Au mieux, c’est une option de lâches et un manque de courage. Au pire, c’est une option anticléricale maçonnique qui veut en finir une fois pour toutes avec son passé catholique honnis.
J’aurais plutôt tendance à pencher vers la seconde proposition (même si la première est aussi valable). L’état veut refouler l’expression du religieux à la sphère privée. Nous savons toutefois que le refoulement n’a jamais conduit à la paix, au contraire, il risque de créer davantage de radicalisation, de réactions de communautarisme et de raidissement.
En tant que chrétienne catholique, je trouve dommage que l’expression du religieux – qui fait partie du patrimoine, de la culture et de l’histoire du Québec – soit mise sur le même pied d’égalité (càd aux oubliettes) que les signes religieux portés par des nouveaux arrivants. Sous prétexte que nous voulons être justes pour tout le monde, nous nous renions, nous renions notre passé, nos racines, notre culture, notre histoire, le sang des martyrs et les nombreux saints qui ont bâti cette nation pour nous créer une culture basée sur des valeurs vides de sens, technolâtriques. J’ai du mal à imaginer sur quelles valeurs communes cette charte sera basée. La langue ? Une charte et une loi existent déjà à cet effet. L’égalité homme-femme ? Elle existe déjà dans la charte des droits et liberté. Sinon quoi ? Le partage, l’amitié, la solidarité. Ça nous paraît évident. Avons-nous besoin d’une charte pour autant ?
Ce qui inquiète dans tout ce processus est le souvenir des régimes totalitaires (je sais, j’use de gros mots… mais continuez de me lire) qui voulaient éradiquer toute forme de signes religieux, notamment chrétiens. Même posséder une Bible était dangereux dans l’ancien régime bolchévique. Devrons-nous bientôt retourner aux catacombes comme aux premiers siècles de la jeune Église pour pouvoir vivre notre foi chrétienne ? Beaucoup s’en réjouiraient…
La liberté des uns s’arrête là où la liberté des autres… vous connaissez la suite. Quel est donc cet état tout-puissant qui veut dicter à ses employés ce qu’ils doivent croire ou penser ? Qu’à cela ne tienne, ils devront toujours aller plus loin encore pour empêcher la foi des uns et des autres de s’exprimer. Ils ne pourront s’arrêter à bannir les signes religieux ostentatoires. Ils ouvrent une boîte de pandore car les plus durs ne s’appliqueront pas à obéir à la charte. Qui fera la police de la charte ? Qui donnera une amende à un employé de l’état qui porte une croix au cou ? Celui-ci pourra-t-il perdre son emploi lorsqu’une collègue athée le dénoncera ?
Nous verrons bien où cela nous conduira. En tant que chrétiens, ce n’est pas une obligation de porter un signe religieux distinctif. Par ailleurs, nous sommes des esprits incarnés et nous faisons usage d’objets concrets pour nous représenter et exprimer l’Amour de Quelqu’un qui nous échappe matériellement. Ce signe traduit quelque chose de ce que nous sommes. La foi est quelque chose qui s’incarne, si ce n’est dans un signe distinctif, ce sera dans toute la personne qui se configurera au Christ qu’elle s’exprimera. Comment pourront-ils alors empêcher quiconque de "revêtir le Christ" ? On pourra toujours dépouiller le croyant de ses vêtements ou de ses signes religieux… mais on ne pourra jamais l’empêcher d’avoir la foi et de la dire par tous les pores de son être.
Il y a tant à dire sur ce sujet, on ne peut tout dire en un seul billet. Nous y reviendrons au fur et à mesure que le dossier se développera.
Voir à ce sujet l’opinion du président de la Conférence des évêques, Mgr Pierre-André Fournier : http://www.lapresse.ca/le-soleil/actualites/societe/201308/21/01-4682034-le-bannissement-des-symboles-religieux-a-lencontre-du-patrimoine-quebecois.php
Source : http://commeunpharedanslanuit.wordpress.com/2013/08/25/au-nom-de-la-loi-je-vous-arrete-vous-navez-pas-le-droit-de-porter-une-croix-la-police-de-la-charte/