Session 3 "Qu'en est il du discernement"
Le coeur de la spiritualité ignatienne réside dans les 5 points de Manrese,
- Se laisser conduire par le Dieu Trinitaire
- Reconnaitre la création du monde
- Reconnaitre la présence du Christ
- Reconnaitre le Fils de Dieu entré dans l'humanité
- Aborder les choses d'un point de vue renouvelé
C'est une révélation transformante, c'est une révélation dynamique, la structure de cette spiritualité est toujours dans le mouvement et jamais immobile.
Les exercices spirituels sont une structure qui se vit au travers d'un chemin , 1ere semaine, 2eme semaine, 3eme semaine, 4ème semaine.
Sur ce chemin on ne se structure qu'en avançant. Le secret de cette spiritualité est d'aller de Dieu au monde en épousant le regard de Dieu sur le monde.
La contemplation (qui se fait dans un espace protégé) prépare à sortir de la retraite vers la vie ordinaire où il y a à vivre l'amour reçu de Dieu, dans l'union à Dieu, jusqu'au milieu de la vie.
Là intervient le discernement, les premiers mots de la spiritualité ignatiennes sont "méthode" et "discernement"...
Ignace n'a pas inventé le discernement , St Antoine évoque la question du combat spirituel et du discernement , Jean Cassien , Maitre Eckart en ont parlé aussi.
Le 16ème siècle a un regain d'intérêt pour le discernement, c'est une époque angoissée, qui vit dans une attente de la fin du monde, Luther en assimilant l'Antichrist au Pape participe de ce mouvement qui vise à reconnaitre le mal dans la vie courante.
La théologie est interrogée sur sa propre validité si la spéculation, la réflexion ne donnent pas de résultat crédible et vérifiable on se tourne vers l'expérience.
Et dans cette expérience qui cherche à trouver une trace de Dieu dans l'existence personnelle Ignace propose une méthode pédagogique de discernement, avec 22 règles applicables.
Le Discernement
Qu'est ce que le discernement , en quoi consiste t'il, qu'est ce que cela permet?
1- Pourquoi Discerner ?
Il est nécessaire de discerner pour distinguer les bonnes des mauvaises "motions" (les motions ne sont pas des émotions mais un mouvement )
Dans son expérience personnelle Ignace constate au contact de ses lectures, qu'au contact de la lecture des romans de chevalerie de son temps il ressent de l'allégresse, il forme des projets ,( sans se préoccuper de leur caractère réaliste), et qu'il est très déprimé après.
Par contre aux contact des vies des saints, il ressent aussi de l'allègresse, malgré le récit de leurs difficultés et de leurs privation, et c'est une allégresse qui dure, qui le renforce .
La motion peut être vue comme un projet.
Ignace distingue trois sortes de pensées
- celles qui viennent de nous
- celles qui viennent de l'extérieur, soit du "bon" soit du "mauvais " esprit, l'esprit est comme un terrain pour les idées reçues dans les livres par exemple.
Il y a des pensées volontaires et des pensées qui surviennent. Ses pensées Ignace peut s'y arrêter ou les laisser, les entretenir.
Les pensées produisent de l'effet en lui.
Une pensée agréable pour lui, (vivre la vie d'un héros de chevalerie) a des effets déplaisants, et une pensée désagréable pour lui (vivre la vie des saints ) a pour lui des effets plaisants, du bonheur.
L'effet ne découle donc pas directement de ce à quoi on pense.
Quand Ignace est tout entier dans la "pensée mondaine" il éprouve de la délectation, mais quand elle s'arrête il reste sec et mécontent, le plaisir a disparu
Quand Ignace est tout entier dans le "pèlerinage", il en ressent les difficultés, mais quand la pensée s'arrête il reste content et allègre, c'est la "consolation".
La "consolation" permet de trouver le lieu où Dieu veut nous parler. Ce peut un être un lieu, une action un évènement, une attitude...
Ce qui vient de l'extérieur nous fait des effets , effet de plaisir, effets de sècheresse, plaisir sur le moment et pas de consolation après.
Il y a discernement car nous sommes des êtres de désir et des êtres superficiels, les pensées superficielles sont non-durables, les pensées et désirs durables servent à construire.
La consolation rend capable d'accepter, une relation à Dieu renouvelée, une relation à soi-même renouvelée.
Ce que c'est de vivre son humanité sous la grâce de Dieu.
Ce fut pour Ignace la première expérience de Dieu dans sa vie.
Consolation et désolation
Les motions sont des évènements qui se produisent, il se passe quelque chose, la consolation et la désolation sont datables avec une grande précision.
La consolation est un mouvement qui amène vers le haut.
La désolation est un mouvement qui ramène à des préoccupations basses et terrestres
Il y a trois formes de consolations
1- Un amour sensible enflammé, dans la présence consolante de Dieu, dans le rapport à Dieu, ou l'on n'aime plus les choses pour elles même dans dans la relation au Créateur de toutes choses.
2- Une douleur avec des larmes, qui portent à l'amour, en rapport avec la louange de Dieu, une manière de lacher-prise de se laisser atteindre par un autre, de renoncer à une image fermée sur soi qui ne consent pas à souffrir.
3- Tout accroissement intérieur de foi d'espèrance et de charité. Cette consolation est d'avantage dans les actes et les effets produits que dans le sensible...
Dans l'ordre d'apparition des expériences
Les consolations
1- La première est nécessaire pleine de gratifications
2- La consolation douloureuse est une consolation qui ramène la joie , elle est différente de la tristesse ou du malheur qui enferme sur soi-même, elle est une purification de l'amour, un consentement à ne pas vivre l'amour sous la forme la plus gratifiante pour moi.
Comme la compassion qui me fait me soucier davantage d'autrui que de moi-même.
Il n'y a pas d'amour véritable sans passage par la douleur mais l'amour ne commence pas par la douleur.
Moins sensible, plus gratuite plus tournée vers Dieu et moins vers le plaisir
3- La troisième forme est présente en définitive dans les autres quand elles sont justes
"L'amour enflammé pour Dieu" "Aimer les choses dans le créateur est une expérience de plus de foi et de charité.
La consolation douloureuse va conduire à se détourner de son propre plaisir pour aller vers Dieu.
Pour reconnaitre une consolation il faut qu'il y ait augmentation de la foi, de l'espérance et de la charité.
Au contraire la désolation :
N'est pas la consolation, elle est le produit de "l'ennemi de la nature humaine" , de "l'ennemi de Dieu". Ignace est un optimiste, la vie est première l'ennemi ne peu que s'opposer à la consolation
La désolation "brouille les pistes" et sème le désordre, un mouvement vers les choses "basses et terrestres" sans vis à vis de Dieu.
Perte de l'espoir, perte de la confiance , perte de l'amour.
L'âme se trouve "comme"séparée de son Créateur et Seigneur , on dit "comme " car la relation Créateur-Créature ne peut disparaitre.
"Consolation Spirituelle /Désolation Spirituelle
La consolation n'est pas d'ordre psychologique mais d'ordre théologal elle culmine dans le rapport à Dieu ,l'âme aime dans le consommateur de toutes choses.
La consolation est mouvement vers Dieu, augmentation de la foi, espérance et amour.
Dans la première et la troisième forme de la consolation il y a le bonheur de recevoir sa vie du créateur.
La douleur de la 2ème vient de l'infidélité à la relation de création, pour Ignace le péché est le refus de mettre à profit la liberté pour rendre le respect au Créateur.
La consolation à douloureuse à cause de cette douleur de vivre le fait d'avoir été infidèle. Et c'est là qu'intervient le Christ quand la relation Créateur-Créature est rompue
Face aux deux problèmes
- "vouloir faire sa vie tout seul"..
- "se jeter sur les créatures" en dehors de la relation à Dieu
Le Christ est médiateur.
Le rapport constant du Christ avec le Père rétablit la relation en en montrant la manière d'avoir une relation au Père.
La consolation est le renouvèlement heureux de la relation de création. C'est une bonne "motion" consolante qui entretient la vie. (C'est différent du sens moral).
Bon et Mauvais
Ce qui est bon est ce qui est "sain", qui donne un "profit", la croissance, le progrès, la réussite dans le monde réel.
Le bon chez Ignace va toujours du bon vers le meilleur dans le monde réel et non pas dans les chimères des illusions.
Ses fantasmes chevaleresque sur la "belle dame" ne trouvent pas de réalisation.
Son pèlerinage à Jerusalem arrive à se réaliser et il y trouve des forces.
On trouve des forces dans le réel.
L'opposition bon/mauvais est l'opposition de ce qui est vital et réaliste qui accueille la vraie vie, qui vient du créateur, dans la vraie vie , opposition à ce qui n'est pas ça.
Ce n'est pas une affectivité superficielle. Par le discernement l'homme est invité à agir et à choisir, dans leur 16ème siècle Luther présentait l'homme comme lié à deux chevaux qui n'allaient pas dans la même direction, il ne pouvait être qu'écartelé... Et Ignace proposait que' l'homme puisse choisir.
Le discernement n'est pas non plus une "introspection longue et tourmentée" /"une prise de tête", les choses doivent rester simples ...