Bonjour Rachel,
J'ai vu le film en question. À strictement parler du point de vue cinématographique, ce n'est pas mauvais mais pas très bon non plus. Dommage, car j'aime bien Micheline Lanctôt (qui a réalisé ce film et qui y joue également). D'un point de vue catholique, oui l'histoire est délicate mais ce n'est pas scabreux, juste un petit peu forcé par bouts et à la fin. En gros, à la fin des années 50, une soeur enseignante et un jeune dominicain s'éprennent l'un de l'autre sous le regard d'une ado habituellement peu dégourdie mais que sa propre passion pour le beau prêtre rend soudainement perspicace. Aucun des protagonistes n'aura ce qu'il désire car tous trois demeurent très croyants et s'ils vivent la situation comme un tourment, ils finissent par se quitter de gré ou de force, mais librement au fond, par obéissance (pour les deux religieux). Contrairement à ce qu'on aurait pu prévoir, ça ne se termine par un grand défroquage et la dénonciation de l'inhumanité du clergé de l'époque. Plusieurs années après, l'ado est devenue une journaliste respectée et les deux autres sont toujours dans les ordres, à des milliers de kilomètres de distance l'un de l'autre. Micheline Lanctôt a dit que le scénario a pour origine un souvenir de son adolescence à elle, mais avec beaucoup de fantaisie autour pour en faire une histoire. Elle n'est pas croyante, mais elle dit regretter le manque de spiritualité dans la société québécoise d'aujourd'hui, et dit du bien des religieuses qui lui ont enseigné. Malheureusement, le résultat n'est pas à la hauteur d'un Bernard Émond, autre cinéaste incroyant et nostalgique d'un certain passé catholique. En fait, cela ne se compare pas du tout avec La Neuvaine ou La Donation (disponibles en dvd et que je recommande chaudement). Je ne comprends pas que le diocèse de Montréal en ait fait l'annonce; c'est pas parce qu'un film parle de curés et de bonnes soeurs sans insulter l'Église que ça en fait un film porteur de valeurs chrétiennes. À mon avis, Lanctôt reste complètement étrangère à l'univers spirituel, même en se voulant sympathique, même si elle a ajouté Jésus lui-même parmi les personnages de son film. Tant qu'à vouloir faire dans l'onirique (peut-être), il aurait fallu qu'elle sorte du ton réaliste de son récit; là, ça ne colle pas. Pour finir, il y a un personnage que j'ai bien aimé, un peu paradoxalement: la mère de l'ado, plutôt autoritaire, terre-à-terre, pas méchante, mais très méfiante à l'égard des membres du clergé; comme si elle représentait les préjugés de la société québécoise de l'avenir avec le tempérament des mères de famille du passé. J'ai senti que ce genre de personnage a sûrement existé; l'anti-cléricalisme d'aujourd'hui a forcément eu des devanciers.