boisvert Martyr du forum
| Sujet: Le chemin du secret et de la porte étroite Mer 20 Juin 2012 - 4:56 | |
| Deuxième livre des Rois 2,1.6-14. Voici comment le Seigneur enleva Élie au ciel dans un ouragan. Ce jour-là, Élie et Élisée étaient partis de Guilgal. Une troisième fois, Élie dit à Élisée : « Arrête-toi ici ; moi, le Seigneur m'envoie au Jourdain. » Mais Élisée répliqua : « Par le Seigneur qui est vivant, et par ta vie, je ne te quitterai pas. » Ils continuèrent donc tous les deux. Cinquante frères-prophètes, qui les avaient suivis, s'arrêtèrent à distance, pendant que tous deux se tenaient au bord du Jourdain. Élie prit son manteau, le roula et en frappa les eaux, qui s'écartèrent de part et d'autre. Ils traversèrent tous deux à pied sec. Pendant qu'ils passaient, Élie dit à Élisée : « Dis-moi ce que tu veux que je fasse pour toi avant d'être enlevé loin de toi. » Élisée répondit : « Que je reçoive une double part de l'esprit que tu as reçu ! » Élie reprit : « Tu demandes quelque chose de difficile : tu l'obtiendras si tu me vois lorsque je serai enlevé loin de toi. Sinon, tu ne l'obtiendras pas. » Ils étaient en train de marcher tout en parlant lorsqu'un char de feu, avec des chevaux de feu, les sépara, et Élie monta au ciel dans un ouragan. Élisée le vit, et il se mit à crier : « Mon père !... Mon père !... Char d'Israël et ses coursiers ! » Puis il cessa de le voir. Il saisit ses vêtements et les déchira en deux. Il ramassa le manteau qu'Élie avait laissé tomber, il revint et s'arrêta sur la rive du Jourdain. Avec le manteau d'Élie, il frappa les eaux, mais elles ne s'écartèrent pas. Élisée dit alors : « Où est donc le Seigneur, le Dieu d'Élie ? » Il frappa encore une fois, les eaux s'écartèrent, et il traversa.Psaume 31(30),20.21.24ab.25.Qu'ils sont grands, tes bienfaits ! Tu les réserves à ceux qui te craignent. Tu combles, à la face du monde, ceux qui ont en toi leur refuge.
Tu les caches au plus secret de ta face, loin des intrigues des hommes. Tu leur réserves un lieu sûr, loin des langues méchantes.
Aimez le Seigneur, vous, ses fidèles : le Seigneur veille sur les siens ; Soyez forts, prenez courage, vous tous qui espérez le Seigneur ! Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 6,1-6.16-18.Comme les disciples s'étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait : « Si vous voulez vivre comme des justes, évitez d'agir devant les hommes pour vous faire remarquer. Autrement, il n'y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux. Ainsi, quand tu fais l'aumône, ne fais pas sonner de la trompette devant toi, comme ceux qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense. Mais toi, quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra. Et quand vous priez, ne soyez pas comme ceux qui se donnent en spectacle : quand ils font leurs prières, ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et les carrefours pour bien se montrer aux hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense. Mais toi, quand tu pries, retire-toi au fond de ta maison, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra. Et quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu, comme ceux qui se donnent en spectacle : ils se composent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu'ils jeûnent. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont touché leur récompense. Mais toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ; ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement de ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais dans le secret : il te le revaudra. Les textes de la Liturgie de ce jour rendent manifeste comme elle est réelle la marge (ou élevée la marche à franchir), entre un 'frère prophète' et un prophète, entre un fidèle pratiquant et un religieux accompli. Élisée, n'hésite pas à demander à Élie la double part d'esprit de son maître. En Israël, à l'époque, la double-part d'héritage est celle qui était réservée au frère aîné, celui sur lequel avait pesé doublement l'éducation - toujours en vue de la transmission de l'héritage familial, lequel ne comprenait pas uniquement les biens matériels, mais aussi la réputation de la famille. "C'est quelque chose de difficile que tu demandes !", lui répond Élie. Difficile, mais dans quel sens: difficile à donner ou difficile à recevoir... la réponse est que l'héritage d'esprit d'un Élie est beaucoup plus facile à donner qu'à recevoir. Et donc, Élisée, avant d'être comme son maître spirituel, devra passer par les mêmes épreuves. Je sais que cette analyse est correcte car j'en trouve confirmation dans le texte: Élisée constate tout de suite qu'il ne suffit pas d'avoir le manteau d’Élie pour franchir le Jourdain à pieds secs: c'est d'abord la foi d’Élie qu'il est nécessaire ! Il y réussit finalement après avoir invoqué Dieu - mais la difficulté est montrée.
Tout ce travail d'apprentissage de la foi - qui est en fait l'acceptation par le fidèle des épreuves auxquelles le Seigneur le soumettra afin d'élever sa foi, fait l'objet de la prière du Psaume qui suit:
Tu les caches au plus secret de ta face, loin des intrigues des hommes. Tu leur réserves un lieu sûr, loin des langues méchantes.
On devine bien le labeur spirituel qui s'effectue dans le secret des couvents, dans le cœur des élus... qui sont d'abord déroutés et dépouillé de toutes leurs idées préconçues à propos de la sainteté, qui font l'apprentissage de la soumission sans réserve, et subissent l'effacement de l'ego: un parcours difficile de dépouillement qui fait songer au sort de la graine profondément enfouie dans la bonne terre - car il faut qu'elle y meure avant de grandir et devenir un arbre.
Jésus reprend cette pédagogie de la foi en employant le même "secret" de la face du Père. Qu'il s'agisse de la prière, de l'aumône ou du jeûne, il faut pratiquer les trois dans le secret. Jusqu'à quel point ? En me fiant à ce que révèle le "Petit Journal"de sainte Faustine : jusqu'au point où l'expérience de la "nuit de l'âme" devient comme une agonie. Selon ma compréhension personnelle, la majeure partie des fidèles ne deviendront à l'image des saints qu'au moment de leur agonie et de leur mort. Et leur sainteté reste dans le secret du Père. Est-ce que je dis des choses dures, inacceptables ? Je me souviens de ma tante Thérèse décédée d'un cancer qui avait dit sur son lit de mort: "Je ne pensais pas que l'offrande de nos souffrances étaient aussi utiles au Seigneur" - et je me souviens bien sûr de mon père quelques jours avant son décès. Il s'était battu contre l'acharnement thérapeutique jusqu'à obtenir qu'on lui retire les sondes du nez et de la bouche. "Maintenant, je suis heureux !" Et d'après le témoignage de ma mère, cette dernière parole avait été accompagnée d'un "immense sourire".
N'est-ce pas que chacun(e) d'entre nous ressent l'effort qu'il y aura, moins à fournir qu'à supporter, qu'à accepter ? . | |
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