La réforme des régimes de retraite au Québec exacerbe les tensions sociales mais le gouvernement de la province francophone refuse de céder à la pression de la rue et dénonce les débordements des employés municipaux, dont des policiers.
Une commission parlementaire a commencé mercredi ses consultations, préalable au vote d'une loi portant réforme des régimes de retraite des employés municipaux qui multiplient les manifestations dans plusieurs villes québécoises.
Les caisses de retraite du Québec souffrent des mêmes maux que bon nombre de pays occidentaux, avec le creusement des déficits liés au vieillissement de la population (moins d'actifs par retraité) et parfois la dépréciation des marchés boursiers où sont massivement investis les avoirs.
Pour chaque retraité, "il y avait 17 employés il y a quelques années, il y en a trois aujourd'hui", a rappelé le Premier ministre québécois Philippe Couillard en plaidant l'urgence de réformer.
"Le moment de l'action est venu (...), le Québec entre dans une période de changements profonds et nécessaires", a ajouté le chef du gouvernement de la province en refusant de "refiler la facture aux contribuables".
Le gouvernement veut que les employés municipaux (policiers, pompiers, employés de la voirie, administratifs...) cotisent davantage chaque mois pour leur retraite afin d'éviter que la charge ne soit reportée, en cas de déficit des régimes, sur les finances des villes et donc au final sur leur budget et sur les impôts locaux.
Le déficit des 172 régimes de retraite des employés municipaux de la province pourrait à terme avoisiner les 4 milliards de dollars canadiens (2,75 milliards d'euros), dont 2 milliards pour la seule ville de Montréal et 600 millions pour Québec, la capitale de la province.
"Il ne faut pas laisser à nos enfants un problème que nous ne voulons pas voir", a dit Pierre Moreau, ministre des Affaires municipales à l'ouverture des travaux de la commission parlementaire.
- Manifestation violente -
Outre la hausse du taux de cotisation pour arriver à un équilibre 50/50 entre les salariés et la municipalité dans le financement du régime, le projet de loi prévoit également la suppression de l'indexation automatique des pensions de retraite.
Un effort jugé inacceptable par les salariés des villes qui multiplient depuis plusieurs semaines les actions spectaculaires, dont une manifestation violente jusque dans la salle du conseil municipal de Montréal où siégeaient les élus en tout début de semaine.
"On a violé la démocratie", s'est emporté le maire Denis Coderre qualifiant la manifestation d'"agression armée" quand des employés ont pénétré dans la mairie en lançant des dossiers, des verres ou tout ce qui leur tombait sous la main, et ceci sans aucune intervention des policiers sur place.
"S'il y a eu laxisme ou complaisance de policiers", alors il y aura sanction, a promis Marc Parent, directeur de la police de Montréal, déplorant que les policiers sur place "pour assurer la sécurité" aient failli.
Sans vouloir utiliser le mot "crise", le Premier ministre du Québec a reconnu que la province traversait "une période de tensions sociales" avec la nécessité de résorber le déficit des comptes publics.
Les grévistes et manifestants ne comptent pas plier et ont déjà annoncé la poursuite du mouvement avec une grande manifestation le 20 septembre à Montréal. Retraité et ancien patron du syndicat des employés de la ville, Jean Lapierre a promis que ce n'était "que le début des hostilités".
Ces tensions pourraient faire tâche d'huile car la réforme des retraites devrait aussi être élargie aux régimes des secteurs de la santé et de l'enseignement universitaire.
http://www.la-croix.com/Actualite/Monde/Canada-manifestations-et-debordements-au-Quebec-contre-la-reforme-des-retraites-2014-08-21-1194694