Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean 10,22-30.
On célébrait l'anniversaire de la dédicace du Temple. C'était l'hiver. Jésus allait et venait dans le Temple, sous la colonnade de Salomon.Les Juifs se groupèrent autour de lui; ils lui disaient : « Combien de temps vas-tu nous laisser dans le doute? Si tu es le Messie, dis-le nous ouvertement ! Jésus leur répondit: « Je vous l'ai dit et vous ne croyez pas. Les œuvres que je fais au nom de mon Père, voilà ce qui me rend témoignage. Mais vous ne croyez pas, parce que vous n'êtes pas de mes brebis.Mes brebis écoutent ma voix ; moi, je les connais, et elles me suivent.Je leur donne la vie éternelle : jamais elles ne périront, personne ne les arrachera de ma main. Mon Père, qui me les a données, est plus grand que tout, et personne ne peut rien arracher de la main du Père. Le Père et moi, nous sommes UN. »
"Combien de temps vas-tu nous laisser dans le doute ?" demandent les Juifs. Cette interrogation, je l'entends encore aujourd'hui. Certains jours, je l'entends dans les propos enflammés dirigés contre l'Église, comme si l'Église "possédait" Dieu, ou que Dieu fut le dernier mensonge à bannir de la conscience humaine, ce qui est impossible (*)
J'entends le même propos impatient de la part de ceux qui cherchent et qui sont parvenus au stade le plus douloureux de la recherche: une remise en question complète d'eux-mêmes. La résistance du Moi, de la chair, est féroce avant la conversion...
Je l'entends encore dans les blasphèmes de certains grands malades - et ce ne sont pas vraiment des blasphèmes mais des reproches et des façons de crier au secours comme le fit Job : "Pourquoi ne suis-je pas mort dès le ventre maternel, n'ai-je pas péri aussitôt après ma naissance ? Pourquoi s'est-il trouvé deux genoux pour me recevoir, deux seins pour m'allaiter ? Maintenant je serais étendu dans le calme, je dormirais d'un sommeil reposant, avec les rois et les arbitres de la terre." (Voir Job 3, 11-23)
Et Jésus continue de répondre, et sa réponse ne trouve pas le chemin de leurs cœurs, car elle se heurte au barrage de la logique, de la raison, de la nature. C'est toujours le refus de se reconsidérer soi-même : "Si vous étiez aveugles, vous seriez purs et sans péché, mais aussi longtemps que vous dîtes "nous voyons", votre péché demeure !" En effet, si un aveugle déclare qu'il voit clair, quel soin peut-on lui apporter ?
Mais il y a les brebis... Un jour, j'ai retrouvé dans une église la personne qui m'y avait reconduit moi-même - et qui par la suite avait douté. Dans la joie, je lui ai dit: "Tu vois, à un moment donné, il faut savoir s'abandonner, franchir le pas !" C'est le dernier pas qui compte, le pas dans le vide, le saut dans l'inconnu. Il suffit de si peu ! Un peu d'humilité... Jésus, du moins peut se réjouir :"Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et de ce que tu les as révélées aux petits et aux simples !"
(*) S'il est possible de bannir Dieu de sa propre conscience (mais cela reste un choix tout à fait personnel), par contre il n'est pas possible de retirer la question de Dieu. Toutes les générations y passent...