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 l'Eglise au Etats Unis

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Arzur
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MessageSujet: l'Eglise au Etats Unis   l'Eglise au Etats Unis Icon_minitimeMar 25 Sep 2007 - 10:04

Bonjour, je voudrais vous proposer à la lecture cette analyse de Dominique Decherf, publié en 2003 dans la (fameuse) revue jésuite ETUDE. De plus, beaucoup de Québéquois navigent sur ce forum, et j'aimerai bien connaitre les liens entre le Québéc et les Etats Unis au niveau Religieux (catholique surtout). Cet article parle de manière très positive sur l'attitude liturgique des fidèles aux Etats Unis, j'ai cru comprendre que cela n'est pas le cas au Québéc, quelqu'un pourrais me répondre ?

L’Eglise catholique aux Etats-Unis
Un géant sans voix ?


Dominique Decherf, Chercheur associé au Groupe de Sociologie des Religions et de la Laïcité (GSRL). Fellow à l’Université de Harvard 2000/1.


Un habitant des Etats-Unis sur quatre est catholique (65 millions). L’Eglise catholique est ainsi le groupe religieux le plus important aux Etats-Unis, qui se hissent à la troisième place du catholicisme mondial, après le Brésil et le Mexique, à égalité avec les Philippines et devant les pays de la vieille Europe : 14 cardinaux, 300 évêques, 45 000 prêtres, 197 diocèses et 20 000 paroisses. Pour autant, son poids ne se ressent pas dans le gouvernement de l’Eglise, ni en matière théologique, ni au sud du continent qui, en ses deux hémisphères, représente 40 % des catholiques dans le monde (l’Eglise des Etats-Unis y envoie la moitié de ses missionnaires, soit à peine 2 000 religieux et laïcs), ni non plus dans les orientations séculières des Etats-Unis, qu’elles soient politiques, sociales ou économiques.

Le annus horribilis 2002 du dévoilement des scandales d’abus sexuels, longtemps étouffés par la hiérarchie, a paru marquer le commencement de la fin, un apogée indépassable. D’aucuns se sont attendus à une fuite des fidèles d’une Eglise qui, romaine aux Etats-Unis, apparaissait comme le point de tangence ou le trait d’union entre une Europe et une Amérique en proie, par ailleurs, à une dérive des continents.

Or, il n’y a pas déclin mais progression constante d’une Eglise qui occupe désormais le centre de l’échiquier social et politique américain. Parfaitement acculturée, elle paraît, en revanche, vouée à s’éloigner de Rome et à se libérer des influences de la vieille Europe.

Un troupeau privé de pasteurs

On savait déjà que le discours romain sur la sexualité tombait à plat et que les catholiques américains n’étaient plus différents de la moyenne de leurs compatriotes dans leurs comportements vis-à-vis de la contraception, du divorce, voire (à moindre degré) de l’avortement et de l’homosexualité. Au début de l’année 2003, ils sont demeurés largement indifférents au discours du Pape sur la guerre. Le président de la Conférence épiscopale, Mgr Wilton Gregory, a bien écrit au président Bush, dès le 13 septembre 2002, pour lui rappeler les critères moraux d’une guerre juste, répétés dans deux déclarations successives des évêques en date du 13 novembre 2002 et du 26 février 2003. Plusieurs commentateurs catholiques américains proches des néo-conservateurs (George Weigel, biographe du Pape, ou Richard Neuhaus, rédacteur en chef de First Things) ont voulu démontrer que, dans le cas de l’Iraq de Saddam Hussein, ces critères étaient parfaitement remplis. Le 10 février, le théologien laïc néo-libéral Michael Novak a même prêté, à Rome, son concours à l’ambassadeur des Etats-Unis auprès du Saint-Siège pour en convaincre la Curie. A l’inverse, aux Etats-Unis même, on n’a pratiquement pas entendu un seul évêque marquer une position forte sur le sujet pour tenter d’influencer la Maison Blanche, le Congrès, ou simplement l’opinion publique — à commencer par l’opinion catholique. Le dernier texte du Président de la Conférence des évêques est daté du 19 mars 2003 et entérine le fait accompli. Une fois Bagdad tombé, le cardinal Roger Mahony, archevêque de Los Angeles, a, dans une lettre datée du 7 avril, demandé au président Bush d’accorder la nationalité américaine aux Latinos sans papiers recrutés dans les unités combattantes (36 000 seraient dans ce cas).

Pourquoi ce silence ? Parce que les évêques sont privés de toute parole légitime et de toute autorité morale depuis la faillite de l’an 2002. Comment pourraient-ils faire passer un message de justice sociale après avoir échoué si lamentablement à garder les brebis qui leur avaient été confiées ? Mais cette première raison, conjoncturelle, n’est pas la seule : l’épiscopat, dans sa majorité, paraît en décalage avec les prêtres, et encore plus avec les fidèles. Age, formation, mais aussi — ajoutent plusieurs observateurs — leur prisme romain. « Le pape est européen », avait titré un éditorial pertinent : il n’a compris ni la portée du scandale des abus sexuels, ni, plus généralement, la tragédie du 11 Septembre. Il ne comprend plus l’Amérique, et ceux qui lui sont soumis ont failli à l’instruire et à le conseiller, si jamais ils s’y sont essayés. « Que se passe-t-il en Amérique ? », s’était pourtant directement enquis Jean Paul II au début de la crise sur les abus sexuels. La question revêtait une portée dont on s’aperçoit aujourd’hui qu’elle était beaucoup plus générale. L’admiration pour sa personne demeure immense, quasi illimitée, mais elle n’entraîne aucune adhésion en soi à l’institution romaine ou à son enseignement.

L’Eglise catholique américaine n’est plus une Eglise d’immigrants venus d’Europe avec leurs pasteurs, et qui n’ont eu de ressource que de s’appuyer sur le tronc romain pour résister au protestantisme ambiant. La dernière population à avoir achevé son assimilation est sans doute l’irlandaise, la première et la plus solide, dernier réservoir de vocations sacerdotales (y compris en provenance d’Irlande : aujourd’hui encore, le tiers des prêtres nés hors des Etats-Unis). Les scandales de Boston ont scellé sa perte comme rameau distinct, avec, le 13 décembre 2002, la chute de la maison Law, du nom de son archevêque, le cardinal le plus puissant des Etats-Unis (depuis la mort, en 2000, de l’archevêque de New York, l’Irlandais O’Connor). Il n’empêche que le nombre des ordinations continue d’être maintenu, grâce à l’apport de séminaristes nés à l’étranger. Ceux-ci constituent un sur trois des cinq cents prêtres ordonnés dans les diocèses en 2003. Ils ne sont toutefois plus des prêtres de l’immigration, et la communauté hispanique installée aux Etats-Unis ne fournit pas de prêtres en proportion.

Les catholiques américains ont rejoint le mainstream. Ils ne se distinguent pratiquement plus de l’Amérique moyenne : économiquement, ils appartiennent majoritairement à la classe moyenne ou supérieure ; géographiquement, ils sont présents partout, sauf dans le Sud profond (où le pourcentage des catholiques tombe à 12 %) ; ethniquement, ils offrent le spectre le plus cosmopolite, sauf parmi les Africains-Américains (10 % d’entre ces derniers seraient catholiques, parmi lesquels l’actuel Président de la Conférence épiscopale, originaire de Chicago) ; culturellement, ils sont de moins en moins nombreux à éduquer leurs enfants dans l’enseignement catholique (20 % dans l’élémentaire, 10 % dans le secondaire, contre le double il y a une décennie) ; socialement, ils sont sécularisés.

La vierge de Guadalupe

Reste le bloc hispanique : contrairement à ce que l’on a longtemps pensé, il ne devrait pas bouleverser profondément l’équilibre et le rôle de l’Eglise catholique américaine. Les prévisions les plus folles avaient été échafaudées : si la population hispanique devait constituer, à terme, le tiers de la population nord-américaine, comme elle était présupposée catholique, l’Eglise catholique y deviendrait hispanique à 60 %, voire plus. Ces prévisions sont largement excessives : d’abord, les Hispaniques dont il est question sont essentiellement des Mexicains, venant d’un pays anticlérical jusqu’à une date récente. Peu éduqués, peu catéchisés, n’ayant qu’une tradition très superficielle d’encadrement religieux, voire de l’institution ecclésiale elle-même, ils n’émigrent pas, comme les Irlandais, les Italiens, les Polonais ou les Allemands, avec leurs prêtres, pour la simple raison qu’ils n’en ont pas.

La hiérarchie catholique américaine s’est préoccupée de les accueillir et n’hésite pas à prendre des positions socialement et politiquement très avancées sur les questions de l’immigration et de l’asile. Mais elle a accusé un retard grandissant dans la pastorale de ces populations, guettées soit par la sécularisation, soit par les sectes (notamment pentecôtistes), plus proches de leur sensibilité. Elle ne dispose que de 4 % de prêtres et de 3 % de religieuses hispaniques.

Dans une Eglise riche, les Latinos font figure de nouveaux pauvres. Dans une Eglise devenue plus intellectuelle, leur dévotion — populaire, festive, exubérante — tranche. Quelle que soit leur dénomination religieuse, ils restent tournés vers la Vierge de Guadalupe. Le Pape les comprend, certains évêques américains aussi, mais la majorité des fidèles blancs n’est pas accordée. Dans la ligne du synode des Amériques tenu à Rome en 1997, un effort de compréhension du catholicisme sud-américain est en cours, notamment, à l’Université Notre-Dame. Mais, pour le moment du moins, il passe davantage par le dialogue direct avec les pays du Sud que par le truchement des immigrants.

Au total, 60 à 67 % des Hispaniques se reconnaissent de culture catholique. Ils constituent, selon les statistiques et compte tenu des incertitudes concernant le nombre de clandestins, entre le quart et le tiers des catholiques américains (le chiffre le plus élevé étant fourni par la Conférence catholique), mais ils ne pèsent pratiquement pas dans les structures.


Dernière édition par le Mar 25 Sep 2007 - 10:05, édité 1 fois
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Arzur
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MessageSujet: Re: l'Eglise au Etats Unis   l'Eglise au Etats Unis Icon_minitimeMar 25 Sep 2007 - 10:05

Suite de l'article :

Un nouveau gallicanisme ?

Le vide de pouvoir laissé par la crise de 2002 est une occasion unique de promotion du laïcat, proclament à l’unisson, mais non sans nuances, Scott Appleby, professeur d’Histoire à l’Université Notre-Dame (South Bend, Indiana), l’un des trois intervenants laïcs devant la Conférence épiscopale à Dallas, le 13 juin 2002, et Mary Ann Glendon, professeur de Droit à l’université de Harvard et membre du Conseil pontifical des laïcs (présidé jusque récemment par un cardinal américain, Francis Stafford), dans une conférence intitulée The Hour of the Laity (First Things, novembre 2002).

Il peut sembler étonnant que l’on ait attendu jusqu’à ce jour pour réaliser le rôle tenu par le laïcat dans une institution qui ne le cède qu’à l’Etat fédéral, quand on pense à la taille des budgets gérés par les paroisses et à l’énorme appareil d’œuvres scolaires, universitaires, hospitalières et sociales, avec le patrimoine immobilier qui s’y attache dans un pays qui n’a pas connu de nationalisation des biens appartenant aux Eglises. Nous parlons de budgets de 7,6 milliards de dollars pour les paroisses, de dix milliards environ (dont un milliard fourni par les paroisses) pour les écoles primaires et secondaires (qui ne scolarisent pourtant que 5,5 % de la population américaine d’âge scolaire, nettement inférieur au taux français) et de 2,5 milliards pour les programmes sociaux (majoritairement sur fonds publics). A cela s’ajoutent 230 collèges d’enseignement supérieur et universités parmi les plus prestigieux du pays (pour 725 000 étudiants, chiffre en constante augmentation) et 637 hôpitaux (17 % des admissions), la plupart sans lien avec l’institution ecclésiale, disposant de fonds propres et obéissant à un mode de fonctionnement indépendant.

La hiérarchie domine encore étroitement l’administration des diocèses. Jusques à quand ? Les religieuses — qui constituaient il y a dix ans encore 40 % du personnel appointé des paroisses et aujourd’hui environ le quart — vont disparaître à échéance rapprochée, et sont remplacées par d’authentiques laïcs salariés (à coût plus élevé). Mais, surtout, la gestion directe par l’évêque et son chancelier est destinée à être accompagnée, contrôlée — sinon relayée — par des conseils de direction formés de compétences. C’est l’un des enseignements majeurs de la crise de l’an 2002, avec la création d’un board national et de boards diocésains ou régionaux de supervision de l’application des mesures décidées par la Conférence épiscopale concernant les cas d’abus sur des mineurs. On imagine mal, en France, un gouverneur d’Etat (celui du Colorado, encore en activité au moment de sa nomination), équivalent d’un président de Conseil régional, prendre la tête d’un tel organisme, des juges y siéger, ou encore le Numéro trois du F.B.I. (notre Police nationale) quitter son emploi pour accepter le poste permanent de chef d’un bureau chargé de ces questions auprès du président de la Conférence épiscopale.

La qualité intellectuelle des catholiques, de plus en plus nombreux à tous les échelons du pouvoir — économique, financier, administratif, politique, universitaire, judiciaire —, autorise le recours à leurs compétences. Ils ne sont plus en situation de suivre inconditionnellement leur évêque et de n’être acceptés qu’à la sacristie pour servir la messe et aider à la distribution de la communion.

Bien plus, dans cette Eglise qui fonctionne comme une entreprise privée, ils ont de plus en plus prise sur son capital. Les hôpitaux et les universités fonctionnent tout seuls, car ils sont parmi les plus chers du pays et les mieux dotés. En revanche, les écoles et les paroisses sont largement dépendantes, pour leur budget de fonctionnement, des dons réguliers des fidèles, lesquels sont relativement constants et n’ont guère été affectés par la crise ; mais, pour leur budget d’investissement, ils doivent avoir recours à des campagnes de financement auprès des plus fortunés, qui se révèlent, dans les circonstances, plus exigeantes. Outre la Nouvelle-Angleterre (la campagne de levée de fonds pour l’archevêché de Boston fut, en 2002 et 2003, de moitié de celle de 2001), c’est particulièrement vrai de la côte Ouest : alors qu’à Los Angeles et San Francisco la majorité des fidèles sont d’origine asiatique (Philippins, Vietnamiens) et « latino », l’Eglise dépend des plus gros contribuables « blancs » et conservateurs, retirés en Californie.

Pour le moment, l’Eglise endure. Mais la sauvegarde de plusieurs écoles, qui déjà scolarisent de plus en plus de non-catholiques, surtout en milieu défavorisé, notamment des Noirs — car les Hispaniques choisissent majoritairement les écoles publiques —, ainsi que de nombreuses œuvres sociales dans les mêmes conditions, repose de plus en plus sur l’aide publique. Cela explique la popularité en milieu catholique des projets initiés par le président Bush sous le nom de faith-based initiatives, permettant de subventionner sur fonds fédéraux des activités caritatives, ce qui était jusqu’alors considéré comme contraire à la jurisprudence de la Cour Suprême sur la séparation des Eglises et de l’Etat, de la même façon que les school vouchers, sorte de crédit donné aux parents défavorisés pour scolariser leurs enfants dans les écoles de leur choix, c’est-à-dire privées (accepté par la Cour Suprême dans son arrêt du 27 juin 2002, Zelman v.Simmons-Harris, à propos d’une école catholique de Cleveland, Ohio).

On estime à environ 28 % le nombre de fidèles pratiquants réguliers dans les paroisses (contre 49 % il y a quinze ans, statistiques à prendre avec précaution) ; 15 à 20 % de ceux-ci (soit 4 % du total, selon le sociologue Mark Chaves) peuvent être considérés comme « actifs » dans les œuvres catholiques en général, à quelque niveau que ce soit. Or, cette frange se sent frustrée, mal reconnue, et surtout peine à se situer sur l’échiquier social et politique. Traditionnellement démocrates, comme catholiques ethniques, mais aussi par préférence pour les pauvres et les déshérités, ils sont marginalisés dans un parti qui est ouvertement pro-choice et qui a épousé toutes les causes libérales ou libertaires moralement réprouvées par l’Eglise. Si les électeurs catholiques en général ont, lors des dernières élections présidentielles, voté presque à l’unisson du corps électoral (49 % pour Gore, contre 47 % pour Bush), parmi eux les Blancs (ou non-Hispaniques) ont donné la préférence à Bush (52 %, contre 45 % à Gore). De même, plus ils sont pratiquants, plus ils donnent la préférence au parti républicain (53 % pour Bush, contre 44 % pour Gore parmi ceux qui disent assister à la messe chaque semaine). Le slogan d’un « conservatisme compassionnel », avancé par le candidat Bush, exerce un réel pouvoir d’attraction sur cette frange active du catholicisme américain. Délaissé en raison de longs débats avec le Congrès et de l’opposition de la droite religieuse, peu intéressée par l’action sociale, le thème demeure actuel et pourrait ressurgir à l’orée des élections de 2004, tant le président Bush, sans mettre en œuvre son programme sur ce point, a multiplié les gestes en direction des catholiques. Il a nommé, en février 2002, au poste de directeur du bureau chargé du dossier à la Maison Blanche le conseiller juridique de Mère Teresa.

Génération X

Les problèmes de conscience — sexuels, sociaux, juridiques, politiques et ecclésiaux (célibat des prêtres, ordination des femmes) — qui agitent la génération des baby-boomers (celle des années soixante) ne paraissent pas troubler la génération de leurs enfants, dite génération X, nés entre 1965 et 1983 (les 20-35 ans), qui constituent 40 % des catholiques. Un tiers des jeunes (18-29 ans) se disent catholiques (contre un quart tous âges confondus). Le profil de cette population a été bien étudié depuis quelques années : par le National Opinion Research Center [NORC], fondé par Andrew Greeley à l’Université de Chicago, William Dinges et Dean Hoge de la Catholic University of America, dans leur étude résumée dans Commonweal, 17 juillet 1998 ; par la récente enquête de Colleen Carroll, The New Faithful, Loyola Press, Chicago, 2002 ; ou par David Gibson, The Coming Catholic Church. How the faithful are shaping a new american catholicism, Harper, San Francisco, 2003 ; ou encore, par l’ancien rédacteur en chef de Commonweal, Peter Steinfels : A People Adrift. The crisis of the roman catholic church in America, Simon and Schuster, 2003 — cf. Etudes, novembre 2003, p. 551-553).

Sans complexes, ceux d’entre ces jeunes qui se disent catholiques s’affirment pour un catholicisme indéniablement moins « libéral » que celui de leurs parents, mais d’autant plus versé dans les engagements sociaux qu’il est plus ritualiste, plus traditionaliste. Toutes proportions gardées, on pourrait comparer l’époque au mouvement de Oxford dans l’Eglise d’Angleterre au début du xixe siècle, qui a conduit un Henry Newman au catholicisme romain. Les observateurs relèvent une progression de la pratique religieuse, un renouveau liturgique, une mise en valeur du côté sacramentel de l’Eglise, de tout ce qui est spécifique à la foi catholique. Au total, cela n’a rien de surprenant dans une Eglise qui a déjà été beaucoup influencée par Newman et où, comme le Français de passage le découvre avec étonnement lors des offices, aucun fidèle n’ose rester debout pendant tout l’Offertoire, la Consécration et les prières de Communion. Les prescriptions de la dernière encyclique pontificale sur l’Eucharistie ont fait l’objet d’explications détaillées, tenant à l’attitude extérieure à observer pour recevoir la Communion, au moment où les opérations militaires en Iraq venaient à peine de se terminer sans que personne en souffle mot.

L’émergence de nouvelles communautés religieuses est particulièrement spectaculaire. Si la moyenne d’âge des quelque quinze mille prêtres réguliers est de 62 ans, on a pu recenser une centaine de créations de congrégations au cours des deux dernières décennies. Plus des trois quarts ont obtenu une forme de reconnaissance canonique. Si la plupart retiennent les caractères des grandes traditions spirituelles, un quart, cependant, se dit à la recherche de nouvelles visions de la vie soit monastique, soit érémitique, soit encore apostolique.

Certains interprètent cette réaction, à l’instar du mouvement de Newman, comme une réponse au défi majeur que pose aux Etats-Unis l’évangélisme. Entre catholiques et évangéliques, il n’y a plus rien, n’hésite-t-on pas à dire. L’œcuménisme est mort, parce que les dénominations qu’il visait n’existent plus guère. Le protestantisme du « milieu de la route » (mainline) — luthérien, méthodiste, épiscopalien, presbytérien — perd chaque jour des fidèles, au profit soit des évangéliques, soit des catholiques. En réalité, les trois grandes familles religieuses (catholique, évangélique et protestante mainline) sont actuellement considérées comme équivalentes en nombre d’adeptes : autour de soixante millions. Des catholiques sont tentés par l’évangélisme : un quart des Hispaniques, mais aussi des Blancs des classes moyennes ou supérieures. Les premiers se dirigent plutôt vers des Eglises pentecôtistes ; les seconds sont attirés par les télévangélistes ou les prêcheurs des megachurches bâties près des hypermarchés et des échangeurs autoroutiers. L’Américain, toutes tendances confondues, a toujours la nostalgie du sermon vibrant et enflammé qu’il ne retrouve plus dans les homélies trop conventionnelles des messes catholiques. Périodiquement, il se donne au prédicateur qui saura trouver les mots qui le touchent. Pour autant, le catholique ne se laisse pas facilement « convertir » pour devenir un born-again. La pierre de touche de sa foi et de son identité est constituée par les sacrements, l’Eucharistie, la Vierge, le Pape, et finalement le Pauvre — qu’on trouve si peu dans ces grandes assemblées prédicantes, où l’affairisme domine et va de pair avec le culte de la personnalité du pasteur.

Il se peut même que les évangéliques soient plus nombreux à se convertir au catholicisme que l’inverse : 100 000 adultes ont reçu le baptême à Pâques. Les points de convergence sont plus volontiers mis en exergue que les oppositions. Certes, les rapprochements tentés par les néo-conservateurs des deux bords — telle que l’initiative Evangelicals and Catholics Together, lancée en 1992 par un prêtre catholique venu du luthéranisme, Richard Neuhaus, et un ancien conseiller de Nixon, condamné pour sa participation au scandale du Watergate et reconverti en évangélisateur des prisonniers, Chuck Colson — ne semblent pas avoir produit de réelles avancées théologiques, ni des coalitions politiques durables. Les modes d’action les séparent, les catholiques étant beaucoup plus engagés dans des enjeux sociaux — y compris la lutte contre l’avortement — que les évangéliques, qui se manifestent davantage lors des campagnes électorales. Du moins, comme en témoignent les rencontres entre le pape Jean Paul II et Billy Graham (cf. Sébastien Fath, Billy Graham, pape protestant ? Albin Michel, 2002), faut-il convenir que l’anti-papisme est un thème qui ne fait plus recette dans l’imaginaire protestant américain. La raison en est, pour beaucoup, que le catholicisme est devenu pleinement américain, au diapason d’une Amérique religieuse et loin d’une Europe sécularisée

Lien de l'article :
http://www.cairn.info/article.php?ID_REVUE=ETU&ID_NUMPUBLIE=ETU_996&ID_ARTICLE=ETU_996_0633


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MessageSujet: Re: l'Eglise au Etats Unis   l'Eglise au Etats Unis Icon_minitimeMar 25 Sep 2007 - 12:36

Article très intéressant.

Voir aussi le blog de Daniel Hamiche : americatho.

Quod.
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MessageSujet: Re: l'Eglise au Etats Unis   l'Eglise au Etats Unis Icon_minitime

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