Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 10,1-9.
Parmi ses disciples, le Seigneur en désigna encore soixante-douze, et il les envoya deux par deux devant lui dans toutes les villes et localités où lui-même devait aller.
Il leur dit : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers pour sa moisson.
Allez ! Je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups.
N'emportez ni argent, ni sac, ni sandales, et ne vous attardez pas en salutations sur la route.
Dans toute maison où vous entrerez, dites d'abord : 'Paix à cette maison. '
S'il y a là un ami de la paix, votre paix ira reposer sur lui ; sinon, elle reviendra sur vous.
Restez dans cette maison, mangeant et buvant ce que l'on vous servira ; car le travailleur mérite son salaire. Ne passez pas de maison en maison.
Dans toute ville où vous entrerez et où vous serez accueillis, mangez ce qu'on vous offrira.
Là, guérissez les malades, et dites aux habitants : 'Le règne de Dieu est tout proche de vous. '
Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris
N'est-ce pas curieux d'envoyer des hommes deux par deux et non en groupe, avec peu de bagages et pas d'argent ? Or Jésus leur dit lui-même: je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups ! Que d'imprudence ! C'est pratiquement du vagabondage !
Aujourd'hui, je ressens plutôt qu'il s'agit d'apporter un message et que ce message s'encombrerait mal d'un grand renfort de moyens. Il ne s'agit pas de s'adresser à des foules, mais de parler dans des maisons, c'est-à-dire des foyer, c'est-à-dire de parler aux cœurs des personnes autour du foyer.
C'est une image, mais je la garde pour le renversement qu'elle contient : la bonne nouvelle de l'Évangile ne se prêche pas d'en-haut, comme les édits de César, ou les prescriptions des scribes et des chefs des prêtres, mais d'en-bas. C'est qu'on accueille beaucoup plus facilement les personnes dans lesquelles on se reconnaît. Pour la plupart, ces messagers sont des travailleurs, artisans ou cultivateurs, comme ceux qui les recevront. Ils ne manqueront pas, tout en parlant de la proximité du Royaume, de donner un coup de main aux champs ou dans l'atelier.
D'ailleurs, aussi simpliste que cela puisse paraître, le fait de prendre part gratuitement aux taches quotidiennes, c'est déjà le Royaume qui est là. Je me souviens que, dans ma quête éperdue d'une vérité qui serait "acceptable pour le cœur" - dans les années 70, j'avais cru devoir adopter des attitudes particulières, voyager loin, chercher des lieux propices, apprendre un vocabulaire différent, connaître la philosophie, tenter l'expérience du caisson d'isolation sensorielle, etc. Mais j'étais toujours déçu. Par contre, dans mes moments de repos, je rédigeais de courts poèmes, que je déchirais ensuite - et un jour, une amie me reprend et me dit : "mais ce texte est bon, pourquoi l'avoir jeté ?" Elle avait parfaitement raison en ce sens que la vérité est si proche de nous que, la plupart du temps, nous ne la voyons pas même pas ! Comme humains, notre plus grand manque, c'est l'attention aux choses du quotidien.